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198. Un amour de fée ( 31/...) : Chapitre 34

La Prêtresse et l’Elfe noir

 

 

 

Il avait décidé de ne pas retarder son départ. L’enjeu était trop important. Il devait rejoindre au plus vite la Terre des Fées. C’était ce que lui avait demandé la Déesse. La Grande prêtresse, en personne, était venue lui annoncer que le temps était arrivé, mais elle n’avait pas précisé ou peut être tout simplement omis qu’il devrait emmener avec lui une prêtresse. Il n’en avait été nullement question. Il comptait partir seul et au plus tôt. Pendant toutes ces années, le temps lui avait paru une éternité et maintenant, il lui semblait trop court, beaucoup trop court, non qu’il ne soit pas prêt à livrer bataille, il s’y était préparé depuis qu’il avait appris le prochain retour d’Askan mais c’était qu’il y avait encore fort à faire, le plus vital étant le rassemblement de toute son armée qui rallierait dès qu’il en donnerait l’ordre la Terre des Fées. Il serait et il le savait, la Déesse ne l’avait-elle pas choisi, un élément non négligeable dans la bataille pour ne pas dire la guerre qui allait bientôt s’engager. Toute sa vie, il l’avait passée à combattre sous les ordres d’homme sans scrupules, avides de pouvoir. Il avait découvert qu’il existait un autre monde où il n’était plus obligé d’obéir et où il avait la possibilité d’être libre. Il avait le droit comme tout être au bonheur et à la paix. Les elfes noirs avaient été créés pour n’être que de vulgaires esclaves, des mercenaires assoiffés de sang et de haine. Serviteurs fidèles et dévoués, ils n’avaient jamais remis en doute leur mode de vie. Ils accomplissaient ceux pour quoi ils étaient nés. Eliocos avait été l’un des premiers à découvrir qu’ils avaient le choix, qu’une autre vie s’offrait à eux pour peu qu’ils osent la saisir. Il avait été choisi pour libérer son peuple. Pourquoi lui ? Il n’en savait rien, le destin est parfois impénétrable. La Déesse Artésia l’avait choisi. Elle avait, en réalité, entendu les prières de la mère d’Eliocos, une elfe de airs qui avait été enlevée et séquestrée comme tant d’autres afin de donner naissance à une nouvelle race d’elfe : les elfes noirs. Elle savait quel sort funeste lui était réservé tout comme elle avait compris ce qu’il allait advenir de son fils. Elle pria la Déesse de protéger son enfant et d’en faire le Libérateur de son peuple quand le moment viendrait. Elle avait une confiance aveugle en la Déesse qui ne put rester insensible à ses suppliques et accepta de veiller sur l’enfant. Artésia était une toute jeune déesse en ce temps-là et n’avait aucun pourvoir sur les agissements du Mage noir bien qu’elle les récusait. Elle avait juré sa perte après qu’il se soit mis à faire souffrir ses fidèles, ses enfants et savait qu’un jour, elle pourrait le contrer, il le paierait, quitte à ce qu’elle doive se sacrifier... Elle avait, depuis sa naissance, veiller sur lui et attendu l’heure de lui révéler la destinée qui allait être la sienne. Il avait certes une lourde responsabilité sur les épaules mais s’il tenait un tant soit peu de sa mère, il saurait faire face. Même en affrontant sa propre  mort, elle ne montra aucun signe de faiblesse sachant que son fils était en sûreté et que la Déesse le protégerait jusqu’à ce qu’il accomplisse son devoir et il l’avait fait. Il avait lutté contre Askan et cru en être délivré à l’annonce de sa mort. Répit de courte durée quand il apprit qu’il n’en était rien. Il était prêt à se battre à nouveau pour l’éliminer à tout jamais. La clameur des combats, les bains de sang qui ne pourraient être évités lors des affrontement étaient bien loin de ce silence apaisant, de ces petits bruits qu’ils avaient appris à apprécier. Il savourait tout en marchant ce silence réparateur qui lui permettrait à lui et aux siens de trouver la force nécessaire pour combattre. Et il devait ce bonheur à la Déesse et à la Grande Prêtresse qui lui avait ouvert la voie. Il sentait sa présence rassurante à ses côtés à l’improviste parfois quand le doute s’instaurait, parfois quand il se sentait tout bonnement heureux. Elle partageait ses joies et ses peines. Il avait ressenti une impression similaire quand elle était apparue, une aura apaisante se dégageait d’elle alors qu’elle était perdue dans une forêt inconnue ou peu d’âme ose s’aventurer et à bout de force. Cette jeune fille était peut être envoyée par la Déesse pour l’aider. C’était peut-être aussi une façon pour la Déesse d’être à ses côtés et de veiller sur lui. Les dernières paroles plus que troublantes de la jeune fille lui revinrent en mémoire : «  Je suis …. Artésia ».Etait-ce le fruit de son imagination ou simplement dû à l’épuisement de la jeune femme qui ne put prononcer que ces mots ? C’était sans nul doute une phrase entrecoupée dont il manquait une partie. Même s’il lui sembla trouver des similitudes entre ces deux femmes aussi différentes que belles, car il ne pouvait nier que le charme angélique de la jeune prêtresse et son caractère qui paraissait bien trempé ne l’avaient pas laissé indifférent. La déesse était une femme épanouie, belle à en mourir. Il ne put s’empêcher de dresser mentalement la liste de leurs ressemblances. Elles avaient cette même blondeur et ces même yeux bleus et cela s’arrêtait là car leur regard était totalement distincts. Se ressemblant beaucoup, elle n’en était pas moins différente. La jeune prêtresse ne ressemblait finalement en rien à la Déesse. Tout en méditant, il avançait d’un pas rapide avec sa passagère sur le dos qui ne pesait finalement pratiquement, aussi légère qu’un… ange, se dit-il. Cette comparaison l’étonna fort mais elle le fit sourire. Elle en avait l’air en tout cas. S’il devait la comparer à une fleur : ce serait une jeune rose aux teintes pâles fraîchement éclose dont le cœur rosirait timidement alors que la Déesse serait plutôt une rose épanouie à la douceur velours dont les teintes sombres charmeraient le cœur tandis que le parfum suave embaumerait l’air du soir. La nuit allait tomber et il marchait depuis des heures. Il savait qu’elle serait fraîche et qu’il ne trouverait pas d’abri pour se protéger dans les parages. Il devait faire un feu et trouver un endroit pour passer la nuit. Il avança encore de quelques mètres et trouva un endroit paisible, peu encombré, suffisant pour contenir deux personnes. Il n’avait pas besoin de se reposer beaucoup, il dormait très peu, quelques heures lui suffisaient. C’était surtout pour la jeune fille qu’il portait qu’il s’inquiétait. Elle devait reprendre des forces car la route serait longue et semée d’embûches. Ayant décidé qu’il passerait là, la nuit. Il la déposa délicatement sur le sol contre un arbre et la recouvrit de son manteau. Puis, après avoir mis son sac à l’abri dans le creux d’un tronc. Il s’en alla ramasser du bois pour faire un feu. Peu après son départ, Elfinae se réveilla. Encore harassée de fatigue, elle ne reconnut pas toute suite l’endroit. Elle n’était pas dans sa chambre au Temple mais en plein milieu d’une forêt qu’elle ne connaissait pas. A cet instant précis, elle se sentit seule et vulnérable. Même si elle était encore affaiblie par l’effort qu’elle avait dû faire pour trouver Eliocos, elle essaya de se lever mais présumant de ses forces, retomba quasi-instantanément sur le sol. Elle scruta les alentours et ne voyant personne, elle ne savait si elle devait désespérer ou plutôt entrer dans une colère noire. La question ne se posa pas quand elle sentit qu’elle bouillait intérieurement. Il avait osé l’abandonner. Il ne l’avait pas attendue. Il faisait presque nuit et il l’avait laissé seule en pleine forêt avec pour seule protection son manteau. Quelle gentille attention ! Elle fulminait littéralement. Combien de temps avait-il pu s’écouler depuis qu’il était parti ? Seulement une heure ou quelques heures ? Elle avait totalement perdu la notion du temps. La colère lui redonnant des forces, elle arriva à se lever. Ne pouvant contenir plus longtemps sa colère, elle parlait maintenant à voix haute :

-         Il a osé m’abandonner. Il n’a même pas jugé utile de m’attendre, de voir si j’allais bien. Mais non, il devait partir de suite sans se soucier de ce qui arrive autour de lui. J’aurais été plus un poids qu’une aide. Pourquoi la Déesse m’a-t-elle confiée cette mission ? Pourquoi moi ? Je n’ai même pas été capable de…

Elle s’était tue. Les mots ne voulaient plus sortir. Elle avait comme une boule dans l’estomac qui l’empêchait de continuer. Sa colère s’était muée en désespoir. Elle avait trahie la confiance de la Déesse et devrait retourner au Temple sans avoir accompli sa mission. Elle faisait une bien piètre prêtresse. Prenant appui sur un arbre, elle se tenait toujours debout, encore trop faible pour se soutenir seule.

-         C’est vrai que vous n’êtes pas légère, dit une voix masculine aux accents graves et profonds.

Elle fit volte-face. Elle ne l’avait pas entendu s’avancer. Mais, c’était bien lui : son visage tatoué, sa longue chevelure nattée, sa silhouette massive. Elle ne savait que répondre. Elle sentait ses joues en feu. Dans la demi-pénombre de la nuit tombante, elle se dit qu’il ne verrait pas son trouble. Qu’avait-il entendu au juste? De toute façon qu’importait, elle s’était trompée sur toute la ligne et devait lui présenter des excuses. Prenant une profonde inspiration, elle prononça d’une voix contrite :

-         Veuillez, je vous prie, me pardonner mes propos. Je me suis laissée emporter.

 Elle avait baissé la tête et regardé obstinément ses pieds, attendant une réponse. Il la regardait amusé. La jeune fille emballée de tout à l’heure qui enrageait avait cédé sa place à une petite fille sans défense qui attendait d’être grondée parce qu’elle savait qu’elle avait fait une bêtise.

-         Ce n’est rien. Venez plutôt vous asseoir.

Il lui avait indiqué un petit rocher où elle pourrait trouver un siège confortable auprès d’un feu qu’il était en train d’allumer.

-         Mes propos ont dépassé ma pensée. Enfin…

-         Je vous ai dit qu’il n’y avait pas de mal. Il lui tapota gentiment la main.

Le feu prit enfin malgré l’humidité environnante. Il la respectait non pas parce que c’était une prêtresse, bien qu’il éprouvait pour elles une déférence sans borne , mais parce que c’était avant tout une femme qui avait su faire montre de beaucoup de courage et de détermination.

-         Ne vous inquiétez pas. Votre colère était compréhensible tout comme votre désarroi.

Elle rougit. Il avait dû assister à toute la scène. Elle eut tout à coup honte de son comportement. Il avait préféré la laisser se reprendre avant de revenir et il avait même essayé de la faire rire. Confuse, elle ne savait plus quoi dire. Il décida de la sortir de l’embarras.

-         Pendant que je vous ai laissé seule, quelques heures, je suis allée chercher du bois sec pour allumer un feu et j’ai également trouvé quelques vivres. Je n’ai trouvé aucune grotte pour nous abriter. Nous devrons dormir à le belle étoile, ce qui j’espère ne vous gênera pas.

-         Nullement, répondit-elle vivement.  Je ne suis pas difficile et je ne veux pas être une gêne pour vous, ajouta-t-elle d’une petite voix.

 Il s’était levé pour récupérer dans un tronc d’arbre le sac qu’il y avait caché. Elle ne l’avait pas aperçu plus tôt. Il avait dû le porter en plus d’elle. Elle rougit de plus belle quand il lui tendit de quoi se restaurer : quelques fruits, du pain et du fromage. Il en prit aussi pour lui mais une portion légèrement plus petite. Elle s’en rendit compte et protesta mais il lui répliqua qu’elle ne lui saurait d’aucune utilité malade ou épuisée. Elle accepta donc rien ajouter.

Avec tout ce qui s’est passé, elle avait presque oublié les rituels du soir en l’honneur de la déesse. Elle déposa sur le rocher les vivres et se leva. Elle se mit face au nord et commença ses dévotions.

Il s’arrêta de manger pour la regarder. C’était la première fois qu’il avait l’occasion de voir une prêtresse en prière. Une douce mélopée s’envolait de ses lèvres tandis que ses mains formaient des arabesques majestueuses. Les flammes donnaient une couleur dorée à sa chevelure. Elle dansait avec grâce un ballet dont les pas étaient connus des seules prêtresses. Les flammes semblaient suivre ses pas. C’était une des plus belles choses au monde qu’il avait eu l’occasion de voir. Il était subjugué par l’expression qu’arborait son visage. Elle rayonnait. Tout son être participait à la prière. Ce moment de grâce prit fin plutôt qu’il ne l’aurait souhaité et il eut du mal à détacher ses yeux d’elle, mais en fut bien obligé car il ne voulait pas l’embarrasser. Elle souriait toujours et reprit sans un mot place à ses cotés. Il lui tendit son repas et elle l’en remercia d’un regard. C’était à son tour de ne plus savoir quoi dire. Ce fut elle qui brisa le silence.

-         Je n’ai pas l’habitude de le faire devant quelqu’un.

Elle avait préféré ce terme neutre à celui d’homme. Elle n’avait jamais dansé devant un homme et n’avait jamais eu de contact avec eux à part quelques vieux prêtres qu’elles considéraient comme des pères.

Elle se demandait maintenant tout en grignotant si elle avait le droit d’accomplir ce rituel sacré ailleurs que dans le Temple et de surcroît en compagnie masculine. La seule chose dont elle était certaine c’était qu’elle se devait d’honorer la Déesse et cela quel que soit le lieu ou l’endroit et c’est ce qu’elle avait fait et continuerait à faire. C’était là son devoir. N’était-elle pas née pour servir Artésia ?

-         Vous étiez magnifique, osa-t-il, la voyant pensive.

Cette phrase, plus que sincère, était pourtant à ses yeux bien loin de la réalité et de ce qu’elle avait su lui faire éprouver. Il s’était senti emporté dans un monde empli de mystère et de magie dont il savait l’existence mais dont il n’en avait jusqu’alors pas goûter la saveur. Il avait appris à vénérer la Déesse de ce peuple qui avait su les délivrer d’Askan. Il leur avait offert la liberté dans toute sa splendeur. Il avait découvert ce peuple voué au culte de la sagesse et de la nature et un autre monde bien loin des préoccupations guerrières et des batailles sanguinaires.

-         Merci, répondit-elle humblement, un timide sourire sur les lèvres. J’espère simplement  avoir rendu grâce à la Déesse comme il se doit.

-         Ne vous en faîtes pas, la rassura-t-il. Je suis sûre qu’elle s’en sentirait  honorée.

Elle avait su charmer ses sens et il en serait de même pour la Déesse, ravie d’être servie par une telle prêtresse. Et il ne croyait pas si bien dire car cette dernière, cachée dans les branchages, avait assisté à la scène et affichait  un sourire énigmatique. Tout se passe à merveille, pensa-t-elle et elle disparut dans un léger bruissement de feuilles. Et tout à la joie de partager ce frugal repas autour d’un bon feu, ils apprécièrent en silence cette compagnie inattendue et agréable qu’ils offraient l’un à l’autre.

 

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L
salut, j'ai 10 ans,et j'ai eu du mal à comprendre ton histoire. Mais apres ma mére me la lut et sé un tres jolie comte!.<br /> ps escuse moi pour les fautes.
Répondre
M
Pour les fautes, moi aussi, j'en fais encore beaucoup, je dois te l'avouer. Je te demande aussi pardon, à toi comme à tous mes lecteurs.<br /> Ce n'est pas vraiment un conte Lorie mais une grande histoire en plusieurs parties ( il y en a déjà 34 en vérité). J'ai essayé de leur donner l'aspect de petites histoires courtes ( donc tu as raison, on dirait des petits contes, des petites histoires) puisque les publications sont espacées et pour rendre la lecture plus faciles...<br /> Je vais proposer une version simplifiée ou avec annotations pour les mots difficiles pour les plus petits...